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Un jour en colonie

Documentaire  /  2017 /  11 min

Réalisation, image & son / Paolo Jacob & Oscar Aubry

Musique  /  Oscar Aubry

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Visionner / télécharger le film

 

"Un jour en colonie" est un portrait sensible d'un ancien centre de vacances EDF, créé pour les enfants des employés. A travers des univers sonores, le film retrace son histoire, de son âge d'or à son abandon.
 

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Il n'y a aucun discours ni de commentaires dans ce film, si ce n'est le court texte du générique de fin qui nous explique l'histoire de ce lieu, et cependant, tout est dit.

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C’est à une veillée funèbre que nous convie ce film, celle d’un vieux centre de vacances abandonné. Vieux ? Les structures robustes du bâti et son architecture audacieuse affirment le contraire, mais abandonné, certainement, ou plutôt désaffecté. Amputé de sa fonction première, le film la lui rend en ressuscitant la turbulence sonore des voix d’enfants. il nous raconte aussi son abandon avec une partition dissonante et grinçante mais jubilatoire aussi, à l’égal des éloquentes expressions sur les murs abandonnés. Tous les temps sont conjugués dans ce film et se bousculent. Même l’éternité, qui en est dépourvu. La séquence primitive, pourrait-on dire, comme une déflagration, nous a précipités dans la réalité. Mais à l’inverse, d’autres séquences nous berceront de l’illusion première, devenue impossible, grâce aux voix enfantines disputant un match de foot sur un terrain où les projecteurs éteints n'éclairent que l'absence des joueurs.

Critique « d’un jour en colonie » par Catherine Ferrandon

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Ces voix, vestiges des corps disparus, résonneront encore, rendues de plus en plus illusoires par des sons menaçants greffés sur des plans fixes nous dévoilant l’état des lieux. Mais le bruissement de la pluie y a sa place, ainsi que le silence, comme une brève accalmie, précédant une succession en saccade de plans fixes nous faisant retourner sur nos pas, ponctués de la crépitation du verre cassé.

Les seuls mouvements de ce film tourné en plans fixes nous font garder un pied dans la réalité: celle de la permanence de la nature:  le trouble de l'eau, le vaporeux du brouillard, la verticalité de la pluie… et l’ultime mouvement, le saut de la grenouille, nous montre que la nature, elle, se moque bien des décisions humaines. 

Entretien avec Paolo Jacob

Comment est venu l’idée du film ?

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L’idée du film m’est venue au cours de mes ballades sur le plateau de Millevaches où j’habitais en 2017. J’étais allé plusieurs fois dans ce centre de vacances abandonné, seul et avec d’autres personnes et nous avions tous le sentiment d’un gâchis. Ce cendre EDF, à l’architecture singulière, s’intégrant parfaitement au cadre naturel si beau, qui restait solide, les gens du coin l’avaient vu se détériorer au fil des années. Personne ne savait ce qu’EDF voulait en faire. Après l’avoir mis en vente à un prix faramineux, un jour un responsable d’EDF a proposé au village de Faux-La-Montagne, sur lequel le centre est implanté, de le récupérer pour 1 euro symbolique.

Il y a eu une réunion publique et ce jour-là, la salle des fêtes était pleine à craquer. De nombreux projets ont été proposés. Mais les habitants, méfiants, se demandaient si EDF ne voulait pas tout simplement s’en débarrasser. De nouvelles normes concernant l’amiante allaient tomber et il y en avait dans certains des bâtiments du centre de Chammet, par ailleurs déjà en très piteux état. Pouvait-on penser qu’EDF cherchait à esquiver ainsi une obligation de désamiantage?

Ensuite la mairie a dialogué avec plusieurs interlocuteurs d’EDF mais aucun n’était clair sur les modalités de transmission. Et puis EDF a retiré cette proposition de donation sans explication. L’idée de faire revivre le centre à travers des univers sonores a été la base du projet. J'ai proposé à Oscar Aubry, un ami, de venir l’arpenter un week-end avec moi. Nous avons commencé le tournage du film un mois plus tard.

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Pourquoi avoir fait le choix de ce dispositif filmique ?

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L’impression première lorsqu’on arrive au centre du Chammet, c’est celle du temps qui s’est arrêté. Un peu comme dans l’histoire de la belle au bois dormant. Mais sans aucun personnage.

Il y a aussi l’architecture des bâtiments qui a un côté soucoupe volante. Un temps suspendu et quelque chose venu d’ailleurs, une étrangeté mais dans un environnement naturel, vivant.

Ce sentiment d’abandon et de gâchis nous a donné l’envie de faire renaître la raison première d’existence de ce centre. C’est essentiellement à travers un travail sonore que nous avons tenté de le faire revivre.

Notre tournage s’est découpé en deux temps. Un temps d’immersion et d’enregistrement sonore dans un centre aéré voisin et un temps de captation vidéo et d’ambiance sonore au centre du Chammet. Nous avions quelques scènes que nous voulions capter comme un celle du match de foot, du canoé, ou encore de la cantine. Mais la majorité des captations sonores avec les enfants se sont improvisées sur place avec peu de mise en scène.

 

L’univers sonore est autant signifiant que les images visuelles, comment avez-vous travaillé cette symbiose au montage?

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Le montage s’est construit dans la recherche d’une fusion des deux univers, sonore et visuel. Nous avions chacun un ordinateur et nous superposions les univers sonores glanés au centre aéré aux images de plans fixes du centre abandonné. Certaines associations étaient d’emblée évidentes, comme la scène du match de foot sur le terrain de foot abandonné, d’autres beaucoup moins. Des liens inattendus de superposition se sont construits au cours du montage.

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Il y a un seul espace dans votre film, celui du centre, mais plusieurs temporalités, troublantes en cela qu’elles incluent des temps qui se chevauchent ?

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La construction du film s’est faite en conjuguant trois temps : le passé recrée avec la vivacité des échanges, le brouhaha des enfants, les voix des animateurs qui les encadrent, celui, accéléré par une succession de plans fixes, très brefs, qui concentre la violence d’une dégradation comme une compression du temps nécessaire pour que les choses disparaissent, et puis le temps à la fois présent et permanent, qui traverse tout le film.

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